Je n'est pas une autre
Ma mère a appris que j'aimais les femmes en mars dernier. Elle l'a découvert un peu par hasard à cause d'un billet de train et puis à cause de moi qui ai refusé d'inventer un énième mensonge pour cacher "ça".
Je ne vais pas faire durer le suspens, mon coming-out s'est mal passé. Je m'en doutais, ma mère a des opinions arrêtées, tranchées. Pour elle, tout est blanc ou noir, surtout ses enfants, en particulier moi, l'aînée.
Mes larmes ont peu coulé durant cette "semaine noire". J'ai pleuré le septième jour, devant elle. J'ai abdiqué devant les insultes, le rejet. J'ai rendu les armes devant la perspective d'être à la rue le soir même.
Bien sûr, mes amies, la Princesse et Melle Sourire m'ont soutenue. J'ai été entourée, câlinée, rassurée. Elles ont séché mes larmes. Elles m'ont redonné un poil de confiance en moi, enfin je crois. Elles m'ont permis de tenir, surtout. J'ai compris qu'elles avaient été essentielles lorsqu'un matin, sur le quai de la gare, une fraction de seconde, j'ai songé à me jeter sous l'engin qui "entrait en gare, voie 2. Les voitures de première classe étaient situées au milieu du train" et que j'ai renoncé parce M. m'a serré dans ses bras.
Aujourd'hui ma mère accepte un peu mieux la situation, même si les : "j'aurais voulu avoir une autre fille" restent réguliers. On se fait à tout. J'attends impatiemment la rentrée prochaine. J'attends de pouvoir respirer un peu. Respirer, c'est le mot. Bien que la situation se soit légèrement améliorée, je suis en apnée. Constamment.
Je pensais que j'oublierais vite ce coming-out raté. J'espérais que le chagrin et la peur s'envoleraient peu à peu. Je sais aussi que ça fait à peine deux mois. "Que sur les ailes du temps la tristesse s'envole".
J'ai conscience de tout ça. Mais je reste "traumatisée" (avec beaucoup de guillemets [ou pas ] ) par tout ça. J'en cauchemarde la nuit. J'entends les insultes dans ma tête. J'ai du mal à parler de cette semaine là. En générale, je reste en surface. Je récite des banalités telles que : "ce fut difficile", "elle ne l'a pas bien pris" ou encore "elle a été violente, physiquement et verbalement". Voilà,c'est tout. J'ai tendance à résumer sept jours d'angoisse profonde, celle qui empêche de dormir, celle qui fait vomir, celle qui ôte l'énergie, l'appétit, l'envie.
Actuellement, j'ai toujours envie de pleurer quand je raconte ou quand j'y pense. Je dors toujours moins de quatre heures par nuit. J'ai encore besoin d'entendre qu'on m'aime, comme je suis, ou malgré ce que je suis. Je ne sais plus très bien...
En résumé, ma mère a découvert il y a deux mois que j'aimais les femmes. Depuis deux mois, je suis en miettes.